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Santé mondiale menacée : repenser l’action politique dans un contexte de crises multiples

OTTAWA, le 12 juin 2012 — L’économie mondiale entre dans une ère de crises interdépendantes qui touchent la sécurité alimentaire, le secteur financier et le changement climatique, et qui en viennent à menacer la santé des populations partout dans le monde.

Dans un article intitulé Multiple crises and global health: New and necessary frontiers of health politicset publié dans la revue Global Public Health, Ted Schrecker[1], professeur à l’Université d’Ottawa, décrit ces crises, leurs répercussions sur la santé publique mondiale et ce que doivent faire les chercheurs et les professionnels de la santé pour y faire face.

« Pour contribuer efficacement aux nouvelles actions politiques en santé mondiale rendues nécessaires en cette ère de crises multiples, les chercheurs et les professionnels œuvrant dans le domaine de la santé doivent être disposés à participer aux débats sur les politiques économiques et environnementales et leurs conséquences, dit le professeur Schrecker. Sans nécessairement devenir des experts dans ces domaines, ils doivent redéfinir leurs rôles professionnels afin d’y inclure l’aptitude à parler clairement et avec autorité des répercussions sur la santé des populations et sur l’équité en santé. »

La hausse des prix des aliments en 2007-2008 s’est traduite à court terme par une augmentation des cas de dénutrition, ce qui aura probablement des conséquences encore plus graves à long terme. Après avoir baissé en 2008, les indices des prix des produits alimentaires ont recommencé à grimper. En août 2011, un indice largement utilisé avait dépassé le point maximum qu’il avait atteint en 2008. Les acquisitions à grande échelle de terres agricoles dans les pays à faible et moyen revenu réalisées par des investisseurs étrangers ou des gouvernements importateurs de denrées alimentaires constitueront une autre menace à la sécurité alimentaire au cours des années à venir.

La crise financière qui s’est propagée à travers le monde en 2008 a amplifié les effets des hausses successives des prix des aliments dans les pays à faible revenu et représente une menace pour l’aide au développement déjà insuffisante dans le domaine de la santé. De nombreuses économies de l’OCDE ont aussi été très éprouvées, comme en témoignent le taux de chômage de 23 % (dont 50 % de jeunes) atteint en Espagne, une légion invisible de 14 millions de ménages américains menacés de saisie immobilière et le fait qu’un enfant américain sur quatre reçoive des coupons alimentaires de l’administration fédérale. L’ampleur exacte des conséquences à long terme n’a pas encore été mesurée.

Le changement climatique s’échelonne sur une plus longue période, mais nous subissons peut-être déjà certains de ses effets. Un rapport paru en 2009 dans la revue médicale The Lancet décrivait le réchauffement de la planète comme « la plus grande menace mondiale pour la santé au 21e siècle », ce qui englobe la multiplication des organismes vecteurs de maladies, comme les maringouins qui transmettent la malaria, les incitatifs accrus à l’immigration et les effets sur les rendements des cultures.

Se posent donc de sérieux problèmes de justice sociale dans la mesure où les premiers groupes touchés et le plus gravement par l’insécurité alimentaire, par la volatilité financière et par le changement climatique sont constitués de personnes pauvres ou autrement marginalisées qui n’ont pas contribué à l’émergence de ces crises et qui n’ont aucun contrôle sur les conséquences de celles-ci. 

Afin d’éviter des crises futures ou d’en limiter les effets négatifs sur la santé, il faudra miser sur la coopération internationale pour créer des mécanismes supranationaux de régulation et de reddition de comptes. Cela signifie confronter les puissances industrielles comme les banques internationales d’investissement, les entreprises agroalimentaires et les pétrolières, et faire face aux groupes d’influence à l’intérieur des frontières des pays importateurs de denrées alimentaires ainsi qu’à ceux qui contribuent le plus au réchauffement planétaire.



[1]
Clinicien chercheur, Institut de recherche Bruyère; professeur adjoint d’épidémiologie et de médecine communautaire, et chercheur principal à l’Institut de recherche sur la santé des populations de l’Université d’Ottawa. http://uottawa.academia.edu/TedSchrecker

 

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