Un mur plein de vie… et d’avantages
Bientôt, les « murs végétaux » seront chose courante dans nos lieux publics. En ce moment, l’Université d’Ottawa possède le plus haut mur de la sorte au Canada.
L’intérieur ressemble à n’importe quel nouvel édifice : murs de béton peints, bandes contrastantes en acier inoxydable, verre teinté, éclairage tamisé. À l’exception d’un étrange montage de plantes tropicales recouvrant tout un mur, évoquant une expérience de croissance accélérée ou une bande de forêt pluviale amazonienne. Il s’agit en effet d’un mur vivant, installé dans le nouveau pavillon de la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa.
Simple objet de curiosité à l’inauguration du pavillon en octobre, ce mur mérite qu’on s’y attarde davantage. Ce concept sorti du cerveau d’Alan Darlington est une percée dans le domaine de la gestion de l’air et n’est pas sans lien avec la recherche spatiale. Les agences spatiales du Canada et de l’Europe ont acclamé le résultat avant que le chercheur canadien Alan Darlington ne commercialise le mur par l’entremise d’une entreprise fusionnée avec Nedlaw, un spécialiste en toitures de l’Ontario.
« Contrairement à d’autres murs verts, celui-ci filtre de 80 à 85 % des composés organiques volatils présents dans l’air en un seul passage », explique la directrice de l’entretien chez Nedlaw, Ashley DeMarte, qui a conçu le mur végétal de l’Université et participé à sa réalisation. D’une hauteur de presque 24 m (78 pi), c’est le plus élevé au Canada.
Comment ça marche
Les méthodes conventionnelles de filtration de l’air dans un édifice consistent généralement à faire sortir l’air vicié et à faire entrer de l’air frais à l’aide d’un système de ventilation. Le hic de ces méthodes, c’est qu’elles causent nécessairement une perte de chaleur en hiver et une perte de fraîcheur en été, et que si l’édifice est près d’une autoroute ou d’un secteur industriel, la qualité de l’air extérieur n’est pas garantie. Alan Darlington savait que les plantes excellaient à purifier naturellement l’air que nous respirons, mais il était aussi conscient que quelques poinsettias à Noël ne suffiraient pas. Il fallait voir grand – ce qu’il a fait avec son équipe.
« Le mur végétal est un des éléments du schéma de circulation de l’air. Les plantes "aspirent" l’air et le réinjectent dans le circuit », explique Ashley DeMarte. Le mur végétal biofiltre de Nedlaw réduit l’entrée d’air de l’extérieur, ce qui se traduit par une réduction du coût du chauffage et de climatisation. Il peut aussi éliminer la nécessité d’installer des humidificateurs, ce qui constitue également une économie substantielle pour les gestionnaires immobiliers ou les propriétaires.
Le directeur du Service des immeubles de l’Université, Claudio Brun del Re, renchérit : « Contrairement à un système d’humidification mécanique, qui n’a aucune autre utilité, le mur végétal améliore la qualité de l’air, réduit le bruit ambiant et procure un sentiment de bien-être aux personnes qui occupent ou visitent l’édifice. En hiver, il fera l’effet d’une oasis surprise! »
N’oublions pas non plus ses propriétés hypo allergènes. Le mur réduit en effet la concentration de poussière, de spores et de bactéries atmosphériques dans l’air. Voilà qui explique pourquoi il contient rarement des fleurs, qui sont plus souvent porteuses d’allergènes « et causent parfois pas mal de dégâts quand elles fanent », commente Ashley DeMarte en souriant. À ce sujet, soulignons qu’un mur végétal nécessite le même entretien qu’un jardin ou n’importe quelle autre plante. Une fois par mois, les spécialistes de Nedlaw taillent et nettoient les végétaux, plantés dans une feuille de substrat de culture où coule l’eau d’arrosage en arrière-plan.
« C’est bien plus qu’une mode passagère », dit Ashley DeMarte au sujet de la centaine de murs végétaux (ou plus) qui poussent au Canada et aux États-Unis.
Une université verte
La population étudiante et le personnel de l’Université d’Ottawa sont bien au fait des mesures que prend l’établissement pour protéger l’environnement. La section de toit vert du pavillon Colonel By; l’utilisation intelligente de tunnels pour faire circuler l’air chaud entre les pavillons; la récupération de la chaleur dégagée par les serveurs informatiques; l’installation d’urinoirs sans eau et le recyclage de meubles s’inscrivent tous dans un effort soutenu d’économie d’énergie et de ressources. L’engagement écologique de l’Université fait l’envie d’autres établissements et les incite eux aussi… à passer au vert.