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En ligne ou pas, il faut bien enseigner

Jocelyne Morin-Nurse

 Professeur Marcel Lebrun  
Marcel Lebrun  
On estime que chaque année plus de 80 millions de personnes dans le monde suivent un enseignement à distance. Le chiffre d'affaires de la formation en ligne à elle seule se situerait entre 25 et 35 milliards de dollars. Certains qualifient ce phénomène d'apprentissage en boîte de conserve, d'autres de nouveau ou de révolutionnaire.

« Pour moi, certaines formes d'eLearning ne sont pas révolutionnaires », dit M. Marcel Lebrun, professeur et conseiller en technologies de l'éducation à l'Institut de pédagogie universitaire et des multimédias (IPM), Université catholique de Louvain, Belgique. « Il s'agit toujours du professeur qui par un moyen ou un autre verse le savoir dans la tête des étudiants. »

Spécialiste de renom dans le domaine de l'enseignement en ligne et « père spirituel « de la plateforme Claroline, M. Lebrun a prononcé une conférence intitulée « Dans eLearning, ce n'est pas le »e« qui compte le plus », le 30 janvier 2006 à l'Université d'Ottawa.

Utilisée dans 68 pays, 500 institutions et en 31 langues, la plateforme Claroline (de classroom online) est une application gratuite permettant aux enseignants et aux établissements d'enseignement de créer et d'administrer des cours par le Web. En avril 2005, elle était deuxième en popularité sur Internet après Moodle, un autre logiciel de conception de cours en ligne.

Bien que la technologie puisse aider dans l'apprentissage, elle peut aussi y nuire. « Les avantages sont aussi parfois les désavantages », dit M. Lebrun.  « On peut maintenant étudier n'importe où, n'importe quand, mais on propose aussi parfois aux étudiants n'importe quoi, n'importe comment. »

« L'étudiant peut étudier dans son lit à deux heures du matin ou dans sa baignoire à 8 h, mais avec quelle motivation, quel engagement, quel soutien? »

« Il faut retenir que l'apprentissage restera difficile, quelles que soient les technologies. Le rôle de l'accompagnateur devient fondamental. »

L'enseignement en ligne : plus exigeant

Pour profiter pleinement de la valeur ajoutée de cette technologie, il faut bien connaître l'outil dont on se sert afin de faire un choix éclairé quant à la structure pédagogique la plus efficace et afin d'assurer une bonne concordance entre cet outil, les objectifs et la méthode.

« Un bon enseignement à distance est d'abord un bon enseignement », poursuit M. Lebrun.

« Si vous voulez bien enseigner, si vous voulez faire du bon travail collaboratif en ligne, apprenez d'abord ce qu'est l'apprentissage collaboratif autour d'une table. Il ne suffit pas que d'ouvrir un forum. »

« Plus encore que l'enseignement traditionnel, l'enseignement en ligne demande une pédagogie rigoureuse... et beaucoup de travail. »

Au cours de ses travaux, M. Lebrun en est arrivé à faire la synthèse d'études dans le domaine et à produire un modèle mettant en vedette cinq grands facteurs favorisant l'apprentissage :

  1. l'information
  2. l'interaction
  3. la motivation
  4. les activités
  5. la production

Chacun de ces éléments représente une partie à développer.

Il faut informer les étudiants non seulement sur le contenu du cours, mais surtout sur le dispositif, les objectifs et les compétences qui seront acquises.

Il faut soutenir la motivation en s'inspirant d'une littérature abondante,

Il faut travailler les connaissances par des activités comme demander de trouver des points en commun entre deux textes ou encore suggérer un livre.

Il faut favoriser l'interaction, le travail de groupe - un bon remède contre la démotivation et l'abandon.

Il faut vérifier le développement des connaissances par la production d'un « chef-d'œuvre » – permettant de démontrer les connaissances et les compétences acquises.

Concevoir un cours en ligne est bien plus que verser le contenu de son disque dur. Mais en suivant les conseils de M. Lebrun, il est plus facile d'assurer le succès du cours et de profiter des avantages de cette technologie.

« En Europe, l'eLearning est de moins en moins vu comme un gadget, mais comme une nécessité », dit M. Lebrun. « Cet outil est entre nos mains et ses réalisations ne dépendent pas de l'outil mais des personnes qui l'utilisent, enseignants et éducateurs. »

Liens connexes :

Fichier de la présentation du professeur Lebrun (format PDF)

Claroline

Institut de Pédagogie universitaire et des Multimédias, Université catholique de Louvain

Centre de pédagogie universitaire de l'Université d'Ottawa