Jean-Guy Bruneau
Au moment où il fait l’objet de nombreux témoignages de reconnaissance à l’occasion des Retrouvailles 2005, qui marquent son 85e anniversaire de naissance et de ses 60 ans de sacerdoce, le père Roger Guindon a bien voulu partager avec nous quelques souvenirs et réflexions sur sa jeunesse et sa carrière.
Né à Ville-Marie, une paroisse oblate du Témiscamingue, d’un père franco-ontarien, lui-même détenteur d’un diplôme commercial de l’Université d’Ottawa, et d’une mère franco-américaine, le futur recteur de l’Université d’Ottawa a eu l’occasion de se familiariser très jeune avec le monde de l’éducation et le milieu religieux.
Deux de ses oncles y ont été liés de près dont Arcade Guindon, professeur de français, de même que directeur des débats et du bureau des anciens à l’École secondaire de l’Université d’Ottawa. Auguste Morisset, le frère de sa mère, a pour sa part dirigé les bibliothèques de l’Université de 1934 à 1958. Le pavillon abritant la bibliothèque principale porte d’ailleurs son nom aujourd’hui.
Il est donc à peu près certain que bien peu de gens ont été surpris, à l’époque, de voir le jeune Roger Guindon s’orienter vers la prêtrise et l’éducation. Ordonné en 1946, il entreprend un an plus tard une carrière universitaire comme professeur, puis doyen et, enfin, de 1964 à 1984, recteur de l’Université d’Ottawa.
À sa première année comme enseignant, on l’informe qu’il enseignera la philosophie lors de la rentrée de septembre 1947. Quelques jours à peine avant le début des classes, changement de programme : on lui confie plutôt le cours de théologie morale de première année. « Imaginez, je devais préparer mon cours et le donner immédiatement
après. Je réussissais ainsi à me maintenir à peine à deux ou trois jours en avance sur mes élèves », raconte-t-il en riant.
« J’ai enseigné ce cours pendant 17 ans et on ne m’a jamais promu à l’enseignement de la deuxième année du cours. » Cela ne devait toutefois pas l’empêcher de devenir doyen de la Faculté de théologie en 1961.
Au début de juillet 1964, il apprend, la veille même de l’événement, qu’il sera le prochain recteur de l’Université. « C’est le cas de le dire, je ne m’attendais pas à ça. »
Tout en s’avouant bien démuni pour assumer de telles responsabilités, il devait déclarer, à sa façon bien typique lors de la cérémonie d’installation, le 28 octobre 1964 : « Appelé à servir, je réponds : présent! »
S’il a dû relever nombre de défis au cours de sa longue association avec l’Université, il ne manque pas de rappeler que les problèmes ne lui ont jamais causé d’insomnies. Son approche a toujours été toute simple : regarder la réalité bien en face et trouver des solutions concrètes plutôt que s’attarder à nier des évidences.
C’est sans doute cette attitude qui l’a conduit à s’opposer à l’instauration d’une université unilingue française en Ontario, qui, selon lui, imposerait des limites trop grandes aux jeunes francophones et ne pourrait tirer pleinement profit des immenses possibilités de la réalité canadienne.
Parmi les réalisations particulièrement chères au père Guindon, c’est celle d’avoir piloté avec succès en 1965 la transition du statut même de l’Université, en réussissant à convaincre le gouvernement d’adopter la Loi de l’Université d’Ottawa. L’université catholique devenait ainsi une corporation privée dirigée par un bureau des gouverneurs et régie par cette même loi, ce qui lui permettait enfin d’accéder aux subventions gouvernementales.
Bien qu’il ait pris sa retraite il y a déjà 21 ans, le père Guindon suit avec grand intérêt l’évolution de l’institution à laquelle il a consacré 51 ans de sa vie. « Et j’aime bien ce que je vois », commente-t-il, ne manquant pas de rappeler la renommée que s’est taillée l’Université dans tous les grands domaines, dont les sciences sociales, les sciences de la santé, le génie, la médecine et le droit.