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Santé : une façon de penser et d'agir

France Beauregard

Qu'est-ce qui fait que les gens ont plus peur d'un accident d'avion qu'un accident d'auto, même si, objectivement, les risques sont plus grands en auto?

Cette question, parmi bien d'autres, intéresse grandement Louise Lemyre, titulaire de la Chaire de recherche R. Samuel McLaughlin sur les aspects psychosociaux du risque et de la santé, professeure à l'École de psychologie et directrice du Groupe sur les aspects psychosociaux de la santé (GAP Santé).

Mme Lemyre étudie notamment comment le fonctionnement normal des gens, dans leur façon de comprendre et de réagir à leur environnement, influence leurs comportements, leur stress, leur état de santé et leur bien-être. Ces aspects psychosociaux de la santé comprennent les perceptions, les pensées, les émotions, les processus mentaux : tout ce qui fait agir les gens d'une façon plus qu'une autre.

« Liés à la physiologie – même si on ne connaît pas encore tous les mécanismes qui relient physique et pensée – les aspects psychosociaux sont aussi liés à l'environnement social, puisque l'identité et les valeurs, de même que le soutien social, ont des répercussions directes sur les réactions humaines et sur les états de santé », dit la professeure Lemyre.

Les gens ont tendance à surestimer les probabilités très rares et sous-estimer les probabilités plus fréquentes. Il est donc nécessaire d'intégrer à la fois les probabilités et les perceptions des gens dans la gestion des risques ou dans la planification de programmes gouvernementaux. Les travaux de recherche de la Chaire, notamment sur les perceptions des risques de terrorisme, ont d'ailleurs déjà suscité l'intérêt de Santé Canada et d'autres ministères canadiens ainsi que des échanges sur le plan international.

La professeure Lemyre soulève aussi l'exemple de la maladie de la « vache folle ». « La société était préparée à gérer une vache malade, mais ce n'est pas ça qui a fait tomber l'économie et qui a eu des conséquences si graves sur la vie des fermiers : les gens ne réagissent pas seulement à une vache, mais à une menace. Il faut incorporer cela dans nos plans de gestion. »

C'est ainsi que les gouvernements et les communautés doivent développer des ressources pour améliorer le soutien social, pour que les gens aient un sentiment de maîtrise et connaissent les ressources disponibles pour faire face à l'adversité.

Il faut dire qu'on se penche de plus en plus, au Canada en particulier, sur la santé des populations dans leur ensemble, c'est-à-dire qu'on adopte une vision de la santé qui va bien au-delà de la maladie et qui vise davantage le développement de la personne et de la communauté.

La Chaire de recherche R. Samuel McLaughlin sur les aspects psychosociaux du risque et de la santé, qui s'inscrit dans la mission de l'Institut de recherche sur la santé des populations (IRSP) de l'Université d'Ottawa, est interfacultaire et transdisciplinaire.

« L'objectif clé, c'est l'intégration des savoirs et des modes de questionnement. Et pour intégrer les facteurs sociaux et psychosociaux dans notre compréhension des phénomènes de santé, il faut, sur le plan même des structures de recherche, briser l'isolement et mettre nos forces ensemble. »