Daniel Morin
Marc Renaud est formel : l’heure du changement a sonné au Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH).
Pourtant, il affirme d’emblée que l’organisme dont il assure la direction depuis six ans « est probablement l’un des meilleurs conseils subventionnaires au monde dans le domaine des sciences humaines et sociales ». Mais, ajoute-t-il, après 25 années d’existence, le Conseil doit maintenant s’interroger, non seulement sur le rôle qu’il doit jouer, mais aussi sur la direction même que doit prendre la recherche en sciences humaines au Canada.
Pour alimenter le débat, le CRSH a publié trois documents, sous la manchette « D’un conseil subventionnaire à un conseil du savoir ».
Par ailleurs, sur une période de deux mois, le président du CRSH visitera un grand nombre d’établissements universitaires au pays, afin d’animer cette réflexion. Il s’y engage en disant n’avoir aucune idée préconçue sur ses résultats. « C’est une vraie consultation que l’on fait là! Ce n’est pas un exercice de relations publiques », déclare-t-il dans son style direct et lapidaire.
L’Université d’Ottawa était l’une des premières étapes de son périple, dans la première semaine de mars. « Au fond, on veut que le débat se produise sur les campus », dit-il.
Chaque établissement a ainsi son responsable chargé de mener la consultation. À l’Université d’Ottawa, c’est au professeur d’histoire Chad Gaffield que revient ce mandat.
Consultation dont on peut juger de la portée lorsqu’on considère certaines données :
Selon M. Renaud, deux problèmes se posent dans le cadre de la consultation. Le premier a trait au réseautage et aux connexions entre chercheurs en sciences humaines. « Quand on pense à la nature même du Canada, on se rend compte que les gens se connaissent très peu », souligne-t-il. « On s’aperçoit que nos meilleurs chercheurs sont très déconnectés sur le plan international. »
Par ailleurs, le Conseil « n’a aucun outil pour favoriser cette connexion. Nous ne sommes pas outillés non plus pour internationaliser le Canada et la recherche en sciences humaines. »
Le deuxième problème porte sur les répercussions des recherches en sciences humaines. « Dans notre esprit, il faut s’assurer que les chercheurs soient préoccupés par la question suivante : “À quoi ça sert mon travail?” ».
« Il devrait être dans la nature même des universités de prendre une responsabilité dans leur communauté pour que les chercheurs sortent et que les idées circulent en dehors de l’institution universitaire. »
Il estime que le Conseil doit se donner une fonction de « valorisation de la recherche » qui pourrait se faire par l’entremise de nouvelles structures, comme des « confédérations du savoir » et des « cybercommunautés de pratique », parmi d’autres approches suggérées dans les documents de consultation.
M. Renaud se défend bien de vouloir s’engager dans l’ingénierie sociale ou dans la défense des intérêts. « Notre fonction, c’est la science. »